De grandes dents - Enquête sur un petit malentendu : Le livre de Lucile Novat
Et si l'on avait fait fausse route dans l'interprétation du
Petit Chaperon rouge ? De cette histoire familière, on a surtout retenu une mise en garde contre des prédateurs inconnus, intégré l'idée que le danger rôdait dehors. Et pourtant...
Il était une fois, sous une flamboyante capuche rouge, un petit malentendu. Perrault et les frères Grimm s'étaient donné de la peine, ils avaient semé les indices comme d'autres sèment les cailloux, mais en vain. Quelque chose en nous résistait, à nos corps défendants. Affabulation collective, le déni mit tout à l'envers : on verrouilla, d'un même geste, et le contresens et la porte de nos maisons. Rembobinons. Qu'est-ce que c'est que cette grand-mère " folle " de sa petite-fille ? Pourquoi l'enfant donne-t-elle si prestement son adresse au loup ? Aurait-elle d'excellentes raisons de traîner des pieds en chemin ? Est-il bien vrai que la forêt est un danger et la maison un lieu sûr ? Et, surtout, qui se cache sous la couverture ? Un loup grimé en mère-grand, vraiment ?
L'enquête est rouverte. À travers un réseau de récits fictionnels et familiaux, où surgissent, au détour d'un sentier, Sigmund Freud, Virginia Woolf ou encore David Lynch, Lucile Novat dissèque la fable, débusque le tabou, et fait retentir un tout autre avertissement.
Suivi de
Barbie-Bleue, un conte dont vous êtes le Perrault.
De (auteur) : Lucile Novat
Expérience de lecture
Avis des libraires
Avis Babelio
Lucilou
• Il y a 3 mois
J’ai toujours adoré les contes, avec ou sans fées d’ailleurs. Qu’ils relèvent de la tradition orale ou qu’ils soient plus littéraires (ces derniers étant par ailleurs souvent la transcription plus ou moins fidèle de récits oraux bien plus anciens et bâtis sur une trame, un schéma préexistants), j’aime ces récits pour la magie et l’inquiétante étrangeté -parfois cruelle- qu’ils ont apporté à mon enfance et pour tout ce qu’ils ont à nous dire, à nous murmurer sur la vie, l’époque et la société qui les ont vus naître, sur les croyances et les façon de vivre, de penser et d’exister. Souvent le conte est bavard mais il sait cacher derrière ses oripeaux magiques filés d’or, d’arc-en-ciel et de nuées, une autre mélodie qu’il faut savoir entendre, écouter, décoder… C’est une des choses que j’aime chez lui : cet air lancinant sous l’orchestre, ce secret qui ne demande qu’à jaillir, cet éclat quand le miroir accroche le soleil… J’aime aussi cette incroyable capacité qu’il a d’être toujours d’actualité sous ses airs d’institutions empoussiérées, j’aime qu’au fil de réécritures, il puisse revêtir tant de significations, porter tant de symboles. J’aime le voir paré de tous ses ornements collectés au fil du temps et j’aime quand il se déshabille pour me mener à sa source. J’aime enfin le malentendu que son merveilleux laisse planer sur ce qu’il veut vraiment nous dire... Bien sûr, le conte peut être plus ténébreux et il a ses zones d’ombres : poussant les petites filles à rêver d’un hypothétique prince charmant caracolant fièrement sur un destrier blanc comme neige, il ne leur offre pas vraiment d’autres perspectives qu’un mariage et une flopée de baisers non consentis… Quant aux personnages féminins, s’ils ne sont pas non plus blancs comme le destrier suscité, ils se résument le plus souvent à de fausses vieillardes acariâtres… Rien de surprenant toutefois à ce qu’en fac de lettres, je me sois passionnée pour les exégèses des contes de fées, pour les essais, les analyses, les études qui mêlent à l’anthropologie et la sociologie à la littérature, la psychanalyse à la fiction… Comme beaucoup, j’ai lu « La psychanalyse des contes de fées » de Bruno Bettelheim. Si tout n’y est pas recevable, du moins me semble t-il, l’ouvrage comporte tout de même quelques fulgurances et a le mérite d’avoir ouvert la voie. « De Grandes Dents » appartient à la même lignée que les ouvrages de Bettelheim et consorts, en plus pop et surtout en plus moderne. L’essai de Lucile Novat est ancré dans son époque qu’il prend à bras le corps ce qui lui permet de proposer une relecture résolument moderne et éclairée de « Le Petit Chaperon ». Une relecture moderne certes, mais qui viendrait compléter voire corriger les précédentes, parce que oui : nous serions passés à côté du secret, de l’avertissement pourtant à peine chuchoté. « Le Petit Chaperon Rouge », c’est l’histoire bien connue de la fillette toute d’écarlate vêtue qui, munie d’un panier contenant un appétissant goûter, doit traverser la forêt afin d’aller rendre visite à sa grand-mère et qui en chemin se fait harponner par un grand méchant loup trop doucereux pour être honnête. On sait bien ce qu’il veut dire ce conte : à peu près la même chose que les parents qui expliquent à leurs enfants qu’il ne faut pas accepter de bonbons des inconnus qui arrêteraient leurs voitures (ou leurs camionnettes blanches) sur le bas côté pour leur parler. On sait aussi pourquoi la fillette porte du rouge, ce qu’elle signifie cette couleur. Quant au loup… Combien d’expressions contiennent-elles cette brave bête qu’on fait passer pour un monstre depuis la nuit des temps ? La gastronomique « Avoir une faim de loup », la discrète et parfois inquiétante « Marcher à pas de loup », la parfois coquine- parfois très malaisante « Voir le loup »… Oui, on sait que « Le Petit Chaperon Rouge » est somme toute une histoire violente, sanglante même, d’agression voire de viol mâtiné de pédophilie et qu’il semblerait qu’il cherche à faire œuvre préventive. Ce dont on aurait pu se douter si on avait écouter encore davantage la petite mélodie susurrée derrière les recommandations de la mère, c’est l’interprétation du récit que nous propose Lucile Novat. Et si le véritable prédateur n’était pas le loup mais la grand-mère ? Et si le véritable danger ne se trouvait pas dans la forêt profonde mais au cœur même de la maison, du foyer ? Une interprétation troublante mais clairvoyante quand on se penche sur les chiffres avancés par la CIIVISE (commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants) qui font tristement prendre conscience que la famille est souvent plus prédatrice que les inconnus et quand on relit le conte tels que Perrault et les frères Grimm l’ont raconté. A la lumière de l’actualité qu’on se doit de confronter avec nos croyances mais aussi à celle de l’analyse littéraire, de la mythologie, de l’étymologie, de l’anthropologie, l’auteure nous propose donc une démonstration percutante, intelligente, convaincante et glaçante qu’elle nourrit aussi de références cinématographiques intéressantes. Le ton de l’ouvrage, très « punchy », très oral, mâtiné d’humour et faussement léger peut surprendre au premier abord mais c’est un parti pris qui n’a rien de désagréable et qui a le bon goût, non pas d’adoucir le propos, mais d’en rendre -peut-être- la réception moins violente. Je l’ai aussi vu comme une mise à distance de l’auteure qui insère en bas de page des moments de son histoire familiale qu’on devine enténébrée par cela même qui est le sujet de l’ouvrage. « De Grandes Dents » est un essai mordant, convaincant qui nous rappelle, outre la fonction première des conte et des histoires qu’on se raconte depuis des siècles qu’elle qu’en soit la parure, quelques intolérables évidences qu’il ne faudrait plus taire et contre lesquelles il faudrait se battre : sortir du déni et lever le tabou que nous dévoile pourtant le petit chaperon rouge est une première étape… Un texte qui se dévore et qui fait réfléchir, tant pour sa portée méta-littéraire que politique et que j’ai englouti en une après-midi à peine, happée par la finesse de la réflexion et l’engagement de Lucile Novat, même si j’ai parfois regretté un certain manichéisme quant à la vision des auteurs qui l’ont précédé dans cette quête de sens des contes de fées où la vie est pourtant bien plus brutale que féerique. Un dernier mot, enfin, pour la bibliographie extrêmement complète dans laquelle je compte piocher allègrement et l’appendice en forme de livre-jeu, un piège réjouissant qui reprend avec un humour trash les trames les plus connus des contes les plus fameux pour en dénoncer la plus inquiétante étrangeté voire la cruauté. Oui, « Peau d’âne », c’est à toi que je pense, entre autres !
ericmoutarde27
• Il y a 3 mois
La couverture et le résumé m’avaient laissé penser que j’étais face à un essai relativement académique. Le style, original et malicieux, la construction parfois déconcertante et les multiples références contemporaines m’ont d’abord fait un peu tanguer avant de m’embarquer d’une traite dans une analyse pertinente et argumentée sous ses allures décontractées. La dernière partie est un feu d’artifice. À lire absolument. A tous les degrés car le sujet n’est malgré tout… pas très gai…
Vivrelivre
• Il y a 3 mois
Avant même sa parution, j'ai voulu lire cet essai! Parce que Le Petit Chaperon Rouge Parce que cette collection On le sait ! Les contes dits "pour enfants", comme les comptines et chansonnettes, n'ont pas été racontés et écrits pour eux. On sait que leurs mots et paroles disent bien plus que leur sens premier. Et pourtant, veut-on vraiment savoir?! Dans un ton très oral qui ne manque pas d'humour, Lucile Novat nous offre une relecture aussi édifiante que terrifiante de ce conte S'il faut certes faire attention aux loups de l'extérieur, il ne faut pas oublier qu'il y en a aussi à l'intérieur... Qui sont d'autant plus terribles Sans oublier la condition féminine, minimisée, réduite Et l'autrice de nous démontrer à force d'exemples, d'extraits des différentes versions, et de citations, son postulat Elle entremêle son argumentation à son histoire familiale, qu'elle nous dévoile en notes de bas de page, qui étayent et renforcent son propos C'est fin, précis, percutant ! Un coup de cœur !
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• Il y a 3 mois
Très intéressée par l’univers des contes, le livre a retenu mon attention. L’approche est totalement inattendue. Le thème est tout à fait actuel et donne vraiment à réfléchir sur ce que les familles et les non-dits qu’elles protègent. Pour autant, le style m’a déconcertée et l’organisation du texte ne met pas en valeur le fonds de l’ouvrage. Mais un livre a laissé sur une table pour que les curieux s’en saisissent.
Avis des membres
Fiche technique du livre
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- Genres
- Classiques et Littérature , Essais
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- EAN
- 9782355222337
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- Collection ou Série
- ZONES
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- Format
- Grand format
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- Nombre de pages
- 160
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- Dimensions
- 206 x 142 mm
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16,00 € Grand format 160 pages