Mon mari : Le livre de Maud Ventura, Jeanne Cherhal

DEMI TEINTE Un roman que je voulais découvrir depuis longtemps ! Faut dire que le style est innovant et original. La plume y est délicate et inédite. Ici, il est question d'une femme complètement obsédée par son mari et la voilà qui raconte pendant plus de 250 pages la vie de son mari, sa vie autour de lui. Elle s'impose une discipline de fer pour entretenir la flamme, pour qu'ils s'aiment comme au premier jour... Franchement autant de pages à blablater sur un mari, qu'est ce que c'est agaçant !!! j'avoue je me demandais où voulait nous emmener l'autrice et dans le dernier chapitre elle a atteint son but et c'était cool ! Un roman qui se lit facilement, très original mais dont je ne garderai pas un souvenir impérissable.

Maud Ventura nous offre une histoire cocasse et originale. Le personnage principal, complètement névrosé, n'a d'yeux, d'oreilles, de gestes, de pensées que pour son mari. Une belle femme de 35 ans, professeure d'anglais, mariée depuis 15 ans, mère de deux enfants, qui a eu d'autres histoires d'amour et pourtant, elle est fondamentalement prisonnière de sa condition amoureuse. Personnage sans filtre, elle nous livre son obsession pour son mari et c'est follement bien fait, à la fois tendre et grinçant. Borderline, elle joue avec le feu, ose, transgresse, frissonne de peur, retient à coup de chaudes larmes, ses pulsions les plus extrêmes. Telle une ambulancière transportant sa psychée, elle nous embarque avec rapidité et légèreté dans son pays coloré où aimer rime avec trimer. Un seul bémol : l'épilogue est expéditif, un peu décevant.

Voici un roman sur l'obsession. L'obsession que peut susciter un seul être dans votre vie. On parle ici d'obsession amoureuse mais au fil des pages (et si l'on n'est pas trop dingue soi-même), on finit par convenir qu'on est loin du véritable amour. On est plutôt ici dans l'image que certain(e)s se font de l'amour jusqu'à en devenir malade. Cette obsession amoureuse que tout un chacun peut ressentir par moments dans sa vie, à doses plus ou moins homéopathiques, est ici concentrée dans un seul personnage : une femme obsédée par "son mari". Une obsession qui grandit à chaque instant jusqu'à annihiler totalement l'existence même de cette malheureuse qui ne vit plus qu'au travers de ses questionnements, de sa jalousie, de sa peur, de son besoin de tout contrôler et de l'idée qu'elle s'est forgée de ce que doit être l'amour conjugal. Je dois dire qu'observer l'esprit de la narratrice sous le prisme d'un microscope était plus que jouissif : "un délice irrésistible" nous dit Nothomb qui ne pouvait qu'aimer un livre qui dissèque avec une telle minutie un cas aussi exceptionnel de dérive psychologique. J'ai beaucoup aimé d'autant que j'attendais le dernier chapitre en me doutant de son contenu (ça aurait été inconcevable autrement) !

J'ai fait les chose à l'envers, en lisant d'abord Célèbre, de la même autrice et qui vient juste de sortir. L'ayant adoré, j'ai décidé de lire son premier, Mon Mari. Si je lui ai trouvé quelques longueurs, j'admets volontiers qu'elles sont utiles et traduisent l'état psychique obsessionnel de la narratrice, sur lequel repose le livre. Sans la toute fin, à savoir l'épilogue, je serais restée sur ma fin. Mais cette fin remet tout en perspective. J'ai aimé ne pas particulièrement aimer la narratrice (là où cela semble justement avoir dérangé certains lecteurs), j'ai aimé qu'on ne nomme pas les personnages principaux, petite prouesse tout au long du livre sans que cela devienne lourd à la lecture. J'ai aimé le style franc et accessible. J'ai aimé le ton neutre pour raconter le pire, sans le valoriser, sans le dévaloriser, juste le raconter. J'ai aimé le retournement à la fin, nécessaire, auquel je ne m'attendais pas. Bref, un bon premier roman !