Où vivaient les gens heureux : Le livre de Joyce Maynard, Anny Romand

Je navigue de ferme en ferme dans mes lectures. Tiendrions-nous là un poncif de la littérature américaine ? Il y a eu « Un dernier verre au bar sans nom », et bien sûr « Nous étions les Mulvaney. » Le tropisme rural des écrivains outre-Atlantique se vérifie avec ce roman de Joyce Maynard, « Où vivaient les gens heureux. » Je suis fascinée par cette représentation idyllique de la campagne comme seul lieu de vie épanouissant, où les enfants s’épanchent sur les animaux, où des parents ingénieux bricolent des jouets avec deux bouts de bois, où règne un joyeux désordre au milieu duquel on se blottit le soir au coin du feu, tous repliés dans la même couverture. Où la maison incarne de manière totale la famille – c’est le thème du bookclub du @prixbookstagram de ce mois-ci. Remarquez qu’aucun des héros n’est un cultivateur ou un éleveur, ils nourrissent quelques animaux d’ornement et glissent des fleurs fraîches dans des vases. Néanmoins, cette fable bucolique fonctionne très bien, car elle est construite autour d’Eleanor, la mère de famille. Elle maintient sur ses seules épaules cet édifice fait de bric et de broc. Dans cette maison, trois enfants, non, quatre, enfin, le père qui est aussi insouciant qu’un garçonnet, et même complètement irresponsable. J’ai rarement ressenti autant d’empathie pour un personnage. Eleanor a peuplé mes pensées, même après avoir refermé le livre. Je cherchais à comprendre les voies qu’elle emprunte, parfois incohérentes. Là se trouve toute la force de cette lecture : l’humanité désarmante d’une mère qui compense les failles des uns et l’absence des autres, qui cherche des heures la chaussure d’une Barbie, et pour laquelle il n’y a parfois – souvent – que des mauvais choix. Une lecture éblouissante d’émotion.

C'est une tranche de vie et j'ai adoré c'est poétique , féministe et a la fois très triste . On ressent beaucoup d'émotion Eléonore nous emmène dans une partie de sa vie en faisant un retour en arrière dessus . On y retrouve pas mal de sujets lourds et grave qui sont encore d'actualité dans notre société . L'histoire se déroule au début des années 70 jusqu'à nos jours . Et tout le long du récit on va découvrir tout une psychologie face au événement dramatique de la vie . J'ai vraiment aimé il se lit tout seul on est transporté et en même temps on est touché par tout ce que Eléonore a traversé toute les injustices auxquelles elle a fait face .

Une femme, Eleanor, sa vie des années 70 à nos jours. Un lieu, une ferme, gardienne des traumatismes et des joies, de l’amour et des drames. Joyce Maynard tisse une fresque sur ce qu’est être une fille, une femme et une mère. Son œil juste, son humanité prégnante nous mettent face à nos illusions et nos contradictions. Les succès ne sont pas forcément ceux qu’on attendait, les frustrations résultent parfois d’un excès de dévotion. L’autrice nous ouvre son univers poétique aux couleurs délavées , aux senteurs boisées du New Hampshire. Redondance exquise dans l’œuvre de Maynard, le temps est un allié qui apaise et répare. Peu à peu des chemins se dessinent menant à la paix et l’acceptation.

Chère Eleanor, J'ai suivi page après page, le récit de ta vie, la famille dysfonctionnelle dans laquelle tu as grandi jusqu'à te retrouver orpheline à 16 ans. Mais heureusement pour toi, la famille de ta camarade de chambre décide de te prendre sous son aile, de t'offrir un foyer de substitution avec "un frère" et "une sœur". Un frère tu en as toujours rêvé. Un frère avec qui tout partager, un frère pour te protéger, un frère qui t'aurais tenu compagnie quand tes parents te laissaient seule pour passer tu bon temps tous les deux loin de toi. Mais ce frère de substitution n'est pas celui que tu aurais voulu avoir, il ne voit en toi qu'une fille avec laquelle il peut passer tu bon temps et toi, ne sachant comment réagir tu subis. Grossesse non désirée, avortement clandestin, ta jeunesse se brise un peu plus. Mais tu es résiliente, tu as l'art avec toi, tu as tes études, tes dessins, ton exutoire et puis vient le succès, l'indépendance et cette maison que tu décides d'acheter dans laquelle tu projettes tant d'espoir de famille heureuse, d'enfants gais et facétieux. Cam t'offrira tout cela mais après quelques temps et deux enfants, le quotidien et les obligations, la dure réalité ou devrais-je dire la vile réalité économique vient s'insinuer dans ton foyer, dans ta tête au point de te faire trébucher voire basculer et prendre la direction de Crazyland. Tu aimes tes enfants plus que tout, la simple idée qu'il leur arrive quelque chose te rend dingue, tu veux les protéger à tout prix, faire qu'ils ne souffrent jamais. Tu te débats et ton mari se laisse vivre. La rancune gagne un peu plus ton cœur chaque jour jusqu'à ce jour tragique où vos vies basculent à jamais. Lorsque votre couple explose à cause de l'infidélité de Cam, tu tais tout aux enfants pensant qu'il leur expliquera les choses mais il ne dit rien et toi non plus. Tu prends tout sur toi et tes enfants t'en veulent pour ça : tu es celle qui est partie, qui a brisé le cœur de leur père, cet homme tellement louable qui a fait des choses extraordinaires. Alors que celle qui est brisée c'est toi mais tu en portes aussi une part de responsabilité. Eleanor, ton histoire m'a touché car dans celle-ci se reflète l'histoire d'autres femmes, d'autres couples, de rêves bafoués, de vies qui basculent... Mais, après l'amertume, la solitude, vient le temps de la reconstruction et du pardon et peut-être qu'après tout c'est cela qu'il faut retenir.