Cabane : Le livre de Abel Quentin, Pierre-François Garel
Les résultats de l'IBM 360, alias " Gros Bébé ", sont sans appel : si la croissance industrielle et demographique ne ralentit pas, le monde tel qu'on le connaît s'effondrera au cours du XXIe siècle. Au sein de l'équipe, chacun réagit selon son tempérament ; le couple d'Américains, Mildred et Eugene Dundee, décide de monter sur le ring pour convaincre l'opinion mondiale de l'urgence d'une réaction ; le Français Paul Quérillot songe à sa carriere, rêve de vivre vite et de gagner des millions ; et l'énigmatique Johannes Gudsonn, le Norvégien, surdoué des maths ? Gudsonn, on ne sait pas trop. Certains disent qu'il est devenu fou ...
De la tiède insouciance des
seventies à la gueule de bois des années 2020,
Cabane est le récit d'une traque et la satire féroce d'un monde qui danse au bord de l'abime.
De (auteur) : Abel Quentin
Lu par : Pierre-François Garel
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Expérience de lecture
Avis Babelio
ODP31
• Il y a 1 mois
L'homme descend de l'autruche. C'est l'histoire de deux américains, d'un français et d'un norvégien mais ce n'est pas une blague belge. Ces quatre jeunes chercheurs publient en 1973 les résultats d'une étude mondiale sur l'avenir de la civilisation industrielle qui annonce la catastrophe écologique et le constat est clair : On va tous crever ! Pour en arriver à cette conclusion, ils ont gavé « Gros bébé », surnom de l'un des premiers IBM, encore plus vieux que mon premier AMSTRAD 464 à cassettes, de milliers de données. L'épuisement des énergies fossiles et de nos insouciances avec une démographie galopante imposent un ralentissement de la croissance industrielle et des vasectomies en série. Impossible d'exploiter à l'infini une planète en rupture de stock. Quand y'en a plus, y'en a encore. Publicité mensongère. L'étude a un grand retentissement mais l'écho se perd dans les abysses du déni collectif. Les mauvaises nouvelles n'arrangent personne et ne sont bonnes, ni pour le moral, ni pour les affaires. Librement inspiré du rapport Meadows portant sur « Les limites de la croissance » publié en 1972, Abel Quentin s'attache dans ce roman politique mais qui n'a rien de militant, à raconter comment ces prêcheurs du désert vont porter la croix de la vérité et passer le cap de la désillusion. Parmi ces lanceurs d'alertes générales, Eugène et Mildred Dundee vont incarner et s'approprier le rapport, enchainer les conférences et devenir des militants anti-croissance avant une reconversion dans l'élevage bio de porcs dans l'Utah. Un recyclage digne des tournées Stars 80 pour d'anciennes vedettes à paillettes liftées. Paul Querillot, le français, Rastignac du quatuor, va préférer vendre son âme à l'industrie pétrolière. Cynique, il va devenir une caution scientifique à la boulimie pétrolifère et millionnaire pour joindre le futile à l'agréable. Il chante le fuel sentimental qui n'a plus soif d'idéal. Et puis il y a le Norvégien Johannes Gudsonn, le plus mystérieux de la bande, un mathématicien sociopathe qui a disparu de la circulation. Les raisons de son absence hantent la partie la plus passionnante de ce roman. En conte d'effet, pour les 50 ans du rapport, un journaliste va partir sur les traces de la « Cabane » du titre qui fut celle du génie nordique. Située sur l'île d'Osterøy en Norvège, elle est l'une des étapes de la vie d'errance et de perdition mentale du crack des maths après la publication du rapport. Est-ce que le saumon est remonté à la source pour manger des Fjords nature ? Pas vraiment. La dérive de ce champion de l'équation à trop d'inconnus mimétise la folie de Theodore Kaczynski, surnommé « Unabomber » par le FBI, vrai mathématicien devenu éco-terroriste et auteur de nombreux colis piégés. D'ordinaire, partisan du sans-plomb, je fuis les romans rétrospectifs de politique-fiction, du genre « Y'avait qu'à fallait qu'on » qui tournent à la leçon de morale, au coup de règle sur les doigts, au jugement sans appel. Mais la lecture du « voyant d'Etampes » avait été un tel régal littéraire que j'aurai même pu dévorer un livre de recettes végans à partir du moment où il était signé Abel Quentin. J'ai été impressionné par la construction narrative et la profondeur de ce récit. Abel Quentin ne fait pas la leçon. Au contraire, on sent que cette histoire s'adresse aussi à lui, qu'il se reproche sa prise de conscience tardive. Il décrit de façon très subtile notre aptitude à nous construire des consciences sans fenêtres, à barricader nos zones d'intérêts et à blinder nos représentations. Un grand roman du déni. Notre inconscient a toujours été têtu. Il faut le croire pour le voir, selon un proverbe d'aveugles. Je n'aurais pas supporté 48O pages de repentance écologiste en me flagellant avec un poireau bio si Abel Quentin n'avait pas aussi dépassé le Pourquoi pour raconter le Comment. le récit cruel et ironique de ces quatre destins ramène la cause à hauteur d'homme. Ces apôtres ne sont pas des saints. Jalousies, mesquineries, orgueil indissociable de préjugés, ambition et dépression, autant de sentiments exacerbés par la frustration de ne pas avoir été écoutés. le monde entier a débranché son sonotone et à force de parler dans le vide, pointe la solitude des mauvais augures. Ces personnages faillibles, la buée dans le rétroviseur et l'ironie protectrice de l'auteur préservent le récit d'une dérive pamphlétaire et renforcent son ambition romanesque de façon remarquable. Nostalgie des cabanes, passoires thermiques mais forteresses d'enfance.
Bellonzo
• Il y a 1 mois
Abel Quentin m'avait séduit avec Le voyant d'Etampes, remarquable satire sociale de notre pays et de sa folie. ll récidive avec l'excellent Cabane qui revient sous forme de roman sur un rapport de 1972, le rapport Meadows. Ce document fut probablement le premier à envisager effondrement et décroissance. Je vous dis ça grosso modo, n'étant pas un expert en la matière, c'est le moins que l'on puisse dire. Dans les années 1970, à l'université de Berkeley, Californie, un groupe de chercheurs, un couple d'Américains, un Français et un Norvégien, ont élaboré une théorie sur l'avenir peu engageante. Spécialistes de la dynamique des systèmes, ça a l'air assez abscons, ça l'est d'ailleurs. Mais Quentin s'y entend pour nous intéresser aux quatre destins de ces surdoués dont la trajectoire sera radicalement différente. Le couple Dundee restera assez longtemps sous les feux de l'actualité, en pointe notamment sur l'écologie, leur évolution les ménera loin des seventies encore un peu pyschedeliques. Ils ne sont pas particulièrement sympathiques, les radicaux le sont peu en général. Les deux autres protagonistes ne le sont pas davantage. Paul Querillot, le chercheur français, cherchera effectivement mais surtout à faire carrière en cédant aux sirènes du business énergétique. Un mariage plutôt de convenance et un long time companion, quota de rigueur aux fameuses minorités. Un peu du tout venant, ça, mais Abel Quentin ne manque pas d'humour, assez féroce et clairvoyant. Johannes Gudsonn, surdoué parmi les surdoués, disparaitra longtemps, impénétrable, obsédé par d'impossibles équations mécaniques. Ce sera l'homme dans la Cabane du titre, aux fréquentations plus que douteuses (Unabomber, cela vous dira peut-être quelque chose). Comme je n'ai guère aimé ces personnages. Et pourtant comme ce livre est vraiment très bon. C'est que l'alchimie critique du roman est très efficace. Et, tout comme Le voyant d'Etampes éclairait intelligemment les folles dérives du politiquement correct et du wokisme, Cabane nous en dit beaucoup sur cette société qui danse depuis des décennies maintenant au bord du gouffre. Peut-être que cette humanité ressemble aux gens assis, regardant devant eux, tout de quiétude. Ca s'appelle People in the sun (1960), le tableau d'Edward Hopper qui figure sur la première de couverture. Je l'ai souvent dit, je suis fasciné par l'univers d'Hopper. Et Cabane est un grand bouquin, très loin de la tranquillité.
Melcleon
• Il y a 1 mois
L'auteur réinvente le rapport du Club de Rome, publié en 1972 sous le titre "Les limites à la croissance", met en lumière sa genèse, déchiffre son assise scientifique et romance son devenir en imaginant le parcours de ses quatre auteurs : deux Américains, le couple Dundee, un Français, Paul Quérillot, et un Norvégien, Johannes Gudsonn. Si les deux premiers se muent au fil du temps en scientifiques engagés, ce n'est pas le cas de Quérillot, qui après quelques expériences dans le creuset de la contre-culture californienne revient au pays et valorise ses compétences en tournant le dos à l'issue la plus probable prédite par le rapport : la plupart des scénarios étudiés par les modèles conduisent à un effondrement (sur une planète aux ressources par définition limitées, la croissance de la consommation et de la population se heurtera forcément, un jour ou l'autre, à un mur, ou plutôt débouchera au bord d'un précipice). Gudsonn, lui, constitue un mystère. Jeune mathématicien prodige au début des années 1970, il disparaît rapidement des radars après la rédaction du rapport, et l'une des trouvailles les plus habiles de Quentin est d'avoir composé un personnage de journaliste dont le projet d'article sur le rapport – lequel fête son cinquantième anniversaire sans une ride – prend rapidement une autre tournure : partir à la recherche de Gudsonn. Une moitié du roman est consacrée à cette enquête à la première personne qui vire à la quête obsessionnelle et désespérée. S'ajoutant au travail de vulgarisation, tout sauf ridicule, une galerie de portraits criants de vérité côtoie des figures historiques elles-mêmes quelquefois hautes en couleur. En résulte un ouvrage qui nous fait voyager dans le temps (des années 1970 à nos jours) et dans l'espace : des États-Unis à la France via la Norvège.
PLK
• Il y a 1 mois
La couverture est très attirante avec le tableau du peintre américain Edward Hopper Gens au soleil (1960) ! Une chronique difficile à rédiger, ce livre de la #rentréelittéraire2024 fait plutôt l’unanimité. Et, je termine ce livre en me demandant : Et maintenant, que fait-on ? Allons-nous sombrer dans l’anxiété de la peur de l’effondrement ? Nous sommes en 1973. Cabane pose des questions à travers la vie des quatre chercheurs ayant publié le rapport 21 – calque du rapport de Donella et Dennis Meadows de 1972 – , Il s’agit de Eugène et Midred Dundee tous deux américains, Paul Quérillot, polytechnicien français et Johannes Gudsonn, mathématicien surdoué norvégien. Grâce « Gros Bébé » un IBM360, puissant ordinateur, leur rapport conclut à l’effondrement de l’humanité .. pour 2050. Le roman se découpe en plusieurs parties : la première pour raconter le contexte de la rédaction de ce rapport, deux à suivre l’existence des trois chercheurs Eugène, Mildred et Paul, jusqu’à aujourd’hui. Le chapitre 4 ressemble à une enquête, à suivre les traces du Norvégien dont on ne sait s’il est encore vivant… avec Rudy Merlin, journaliste dépressif et alcoolique, profitant du cinquantenaire du rapport 21.. 50 ans à crier dans le désert ! « #8466;#119990; #120002;#119900;#120007;#120009; #119890;#120008;#120009; #120010;#120003;#119890; #119992;#119900;#120003;#120011;#119890;#120007;#120008;#119990;#120009;#119998;#119900;#120003; #119998;#120003;#120009;#119890;#120007;#120007;#119900;#120002;#120005;#120010;#119890; » p 428 Évidemment, je n’ai pu m’empêcher de penser à Thoreau et Walden.. J’ai aimé découvrir #119845;#119834; #119839;#119851;#119842;#119845;#119854;#119839;#119853;#119852;#119845;#119842;#119855;, qui est à la base le fait de vivre simplement dans la nature, sans détruire ni déranger cette dernière, les boucles de réactions positives ou négatives p 249, apprécié la partie où les Dundee font leur tournée pour informer le monde de l’imminence de la catastrophe, Mildred et Anna Kappa. Les références sont légion et ça, j’ai aimé. Je n’ai pas du tout aimé Paul.. ni la description de la mort de Eugène…ni la fin où s’emmêlent le diable et l’ange des villes.. Beaucoup de moments qui prêtent à sourire notamment les personnages caricaturés (par ex., la gourou crudiste Jacqueline Mallemont.. C’est drôle et à la fois triste et rageant de voir la supercherie et la mise sous emprise de pauvres gens). Le rythme est inégal. J’ai aimé l’écriture, l’ironie, le piquant, même si par moment j’ai eu l’impression que l’auteur plaquait des recettes de rédaction. Ai-je aimé ? J’attendais beaucoup trop sans doute. Je vous encourage à vous rendre chez @nicolemotspourmots et @leslunettesdorees pour leur belles chroniques.
Avis des membres
Fiche technique du livre
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- Genres
- Romans , Roman Français
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- EAN
- 9791036637940
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- Collection ou Série
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- Format
- Livre audio
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- Durée
- 600 min
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