La troisième Hemingway : Le livre de Paula McLain

Une amie m'a prêté ce livre sachant que j'avais beaucoup aimé "Mrs Hemingway" de Naomi Wood. Comme son titre l'indique, Paula McLain écrit une fiction, proche de la réalité, sur la vie de Martha Gellhorn, la troisième femme d'Ernest Hemingway. Comme elle le précise dans les notes en fin d'ouvrage : "Ma Gellhorn n'est pas la Martha Gellhorn telle qu'elle a existé, ce qui est bien sûr impossible." S'inspirant de la biographie de cette femme d'action, originale et indépendante, elle essaie de la cerner dans son quotidien, aussi bien professionnel qu'intime ! Comme souvent, la couverture m'a happée. Voyant un paquebot stylisé, image des nombreux voyages effectués par Martha, je n'ai pu m'empêcher d'imaginer une plume d'écrivain, très appropriée pour retracer son parcours aux côtés de l'auteur du magnifique "Pour qui sonne le glas ". Ernest Hemingway était sensible au charme féminin. Jouisseur de la vie en général, il vivait dans l'instant. Son credo aurait pu être "Ici et maintenant". Les sorties, les amis, les réceptions alcoolisées, tout comme ses enfants, ses amours étaient les piliers de sa vie. Doutant de son talent, malgré les récompenses et les critiques dithyrambiques, ce mode de vie était un rempart contre la face sombre qui finira par l'engloutir. Quand elle l'a rencontré, Martha avait déjà eu plusieurs liaisons avec des hommes mariés. Cependant, elle a toujours lutté pour garder son indépendance. Elle a fait preuve de beaucoup de volonté et de courage pour partir seule dans des endroits instables et dangereux afin d'écrire des reportages pour son journal. La guerre civile espagnole et l'avènement de Franco, la Seconde Guerre mondiale et la montée du nazisme, la guerre d'Hiver en Finlande et la menace de Staline. Être une femme grand reporter nécessite beaucoup de détermination. Dans les années 30, monde masculin par excellence, cela relevait de l'héroïsme. Cette femme hors norme éblouit Hemingway dès leur première rencontre. Il voit en elle comme son miroir au féminin. Malheureusement pour elle, malgré tous ses efforts, sa littérature sera toujours considérée comme une pâle copie du grand maître. Si Ernest s'en amuse, Martha en est blessée. Tout au long du roman, le couple est visiblement très amoureux dans un mode de fonctionnement difficile, ne pouvant se passer l'un de l'autre, mais en même temps, n'arrivant pas à vivre ensemble sereinement. Il est extrêmement difficile de partager sa vie avec une célébrité, une personne publique adulée qui laisse aisément déborder par son côté obscur dans l'intimité. Deux fortes personnalités arrivent rarement à des concessions équilibrées pour ne pas être frustrées. L'une d'elles prend toujours l'ascendant sur l'autre. Si Martha a réussi à maintenir son couple grâce à son amour, s'effaçant derrière son mari, acceptant ses frasques, allant jusqu'à verser dans l'alcoolisme pour l'accompagner dans ses beuveries, elle a fini par reprendre sa liberté, malgré le chagrin qu'elle a pu en ressentir. Pour se sauver, elle devait sortir de cette spirale infernale dans laquelle Hemingway l'avait enfermée sans s'en rendre compte. Paula McLain dresse un portrait tout à fait cohérent du couple que formaient Martha et Hemingway jusqu'à leur séparation. Malheureusement pour moi, le ton de l'autrice n'a pas réussi à me rendre cette femme incandescente attachante. Certes, après le livre de Naomi Wood, Martha n'était pas ma Mrs Hemingway préférée, ma sympathie étant tournée vers Hadley, la première compagne de l'écrivain, celle des débuts, celle des jours difficiles, celle qui a subi les tromperies sans se plaindre pour essayer de préserver sa famille. Cependant, me connaissant, je ne peux pas croire qu'une femme aussi brillante, affirmée et féministe ne m'ait pas touchée. J'en déduis que ma double déception en incombe à l'autrice ou à la traductrice. Dommage !