LE PASSAGE DE LA LIGNE : Le livre de Georges Simenon

Arrivé à cinquante ans, Steve Adams éprouve le besoin de faire le bilan de sa vie et se lance dans un très long monologue, relatant certains souvenirs de sa jeunesse avec une extrême précision. Des arrêts sur image lui reviennent ainsi en mémoire depuis son enfance jusqu'à l'âge adulte, soulevant en lui des états d'âme, des questionnements sur son existence passé, présente et à venir. Doté d'un esprit libre, dégagé de tout conformisme, Steve ne veut pas se laisser enfermer dans une vie tranquille et routinière, un destin qui lui aurait été par avance tracé. Il a toujours osé transgresser les codes sociaux et continue à franchir allègrement et sans regrets les lignes et les frontières imposées par l'ordre moral. Se moquant des obstacles et du qu'en-dira-t-on, il rejette toutes les limites, jouant en permanence avec le feu, déplaçant les lignes à son gré, jusqu'au jour où, tentant le tout pour le tout, il décide de passer une ligne en fraude… Ce roman ressemble davantage à un journal intime. En raison d'un style narratif très long, un peu lourd et ennuyeux, l'intérêt du récit ne m'est apparu qu'assez tardivement, à peu près à la moitié du livre. Georges Simenon déroule, sans concession, le plaidoyer d'un homme éprouvant le besoin de faire face à sa conscience, au mitan de son existence. Il cède ainsi la parole à Steve qui explique sa philosophie de la vie, comparant les imperfections de l'existence des gens aux errances de la sienne, pourtant librement choisie, qu'il revendique à différentes périodes de sa vie, et qu'il continue à vivre, sans contrainte. Le portrait que le romancier choisit de nous présenter est celui d'un individu tourmenté qui refuse de rester confiné indéfiniment dans le moule trop étroit dans lequel la société veut le cantonner. Incapable d'empêcher sa véritable personnalité de s'exprimer, il préfère alors engager sa destinée sur des routes chaotiques, se lançant dans des expériences dont il sait, à l'avance, qu'elles seront vouées à l'échec et dont il ne ressortira jamais indemne.