Le Portrait de Dorian Gray : Le livre de Oscar Wilde

Quel livre quel livre quel livre. L’art et la vie sont mélangés jusqu’à ne faire qu’un et les personnages ont un je ne sais quoi qui les rend si singuliers. À lire par un temps pluvieux, quand les jours sont courts et les nuages pesant. Le livre craint le soleil.

Une écriture absolument magnifique, avec une plume trempée dans l'or, pour décrire une société gangrénée par le vice... Personnellement, si j'ai adoré la prose de monsieur Wilde, les personnages m'ont donné envie de vomir (sauf Basil). Toc toc toc, je cherche "monsieur empathie". Et ce n'est pas tant Dorian Gray qui m'a foutu la gerbe, que ce Lord Henry. Même s'il a de supers punchlines, il représente la mochitude du misogyne insensible superficiel. Entouré de personnalités, probablement très beaux et séduisants superficiellements, mais qui sont moches moches moches à l'intérieur. D'ailleurs n'est-ce pas le propos de l'oeuvre de Wilde? Même si c'est symboliquement, le portrait qui en prend plein la tronche, nous en tant que lecteurs, nous voyons la dégradation morale en première ligne. À mesure que les pages se tournent, l'éclat de l'écriture contraste avec l'ombre des âmes qu'elle décrit. Comme le portrait d'ailleurs, caché dans une pièce sous des tissus... Est-ce que j'ai aimé ce roman? Entre la vacuité des personnages et les interminables inventaires d'objets de luxe comme si je regardais un catalogue de chez Christie's, je ne sais pas. Entre fascination et agacement, j’ai refermé ce roman avec un sentiment mêlé d’admiration pour la plume et de rejet pour le monde qu’elle dépeint. Cela m'a fait penser à ce riche qui a payé des fortunes une banane scotchée pour la manger, tandis que des milliers d'enfants dans le monde meurent de faim. Le luxe et la morale peuvent-elles cohabiter? Ou les riches sont tous des Dorian Gray?

Pour moi, c'est vraiment un livre qu'il faut lire dans sa vie. Il dégage une telle beauté de perfection, en étant si riche, construit, intelligent. J'ai apprécié chacune des phrases, qui me semblaient si poétiques, d'un style robuste et délicat en même temps. Oscar Wilde a vraiment signé un chef d'œuvre, c'est incontestable. Peut-être n'a t il écrit qu'un roman, mais il ne fait pas de doute qu'il est préférable qu'il n'en ait écrit qu'un, et qu'il concentre tout ce qu'un homme pouvait exprimer, d'une façon si complète. Ce roman restera particulier à mes yeux, unique. J'ai tant aimé suivre les personnages ! Ils possèdent tous une identité propre, un nom, quelques allures, passions, relations, mais surtout ! Dorian Grey, Basile Hallward, et Lord Henry. Le premier ayant été séduit par le dernier, alors que le deuxième voyait en lui, tout ce qu'il avait besoin de voir. C'était une forme d'amour unique, admirative, qui l'aveuglait, mais qui dans son essence, était créatrice. La réalité elle...en était tout autre, car chacun n'incarne pas son âme du jour au lendemain, non. C'est plutôt elle qui subit tout ce qui marque l'individu, profondément, Elle est l'individu, mais pas celui qui vit, seulement, celui qui en découle. J'ai tellement apprécié qu'il en soit question tout au long du récit. Lord Henry...qu'est ce qu'il a pu me choquer ! Tout ce dont on a envie, c'est de donner une claque à cet homme. Pour commencer, bien sûr. Convaincu de détenir sa propre philosophie de vérité, qui retourne les valeurs des hommes, dans tous les sens. Un individualisme hédoniste, voilà ce qu'il encourage au moins, ne se préoccupant pas de toute vertu de l'âme, de la personne, tant qu'elle vit de passion et de plaisir ! C'est comme s'il invitait à sauter dans le vide, sans retenue, sans se soucier de la chute, de rien, juste pour profiter pleinement. Mais peut on vraiment en vivre sereinement ? Pas sûr. Nous ne sommes pas des êtres de passions purs qui peuvent tout décider du jour au lendemain, qui peuvent se redéfinir, se jouer, s'incarner dans l'immatérialité, de quelque domaine que ce soit. Je l'ai détesté plus d'une fois, alors qu'il joue avec les paradoxes, les contre vérité, qu'il manie dangereusement les mots. Un espèce de Nietzsche hédoniste et pervers raté, mais si complet ! Il n'en fait aucun doute. Parfaitement détestable parce que parfaitement entier. Dorian Grey...nous suivons son évolution tout le long du livre, si on n'entend pas "amélioration" par évolution, forcément. On le sent sensiblement changer, dans ses paroles...ses paroles ! Plusieurs fois il m'a stupéfait comme Henry. C'est sans compter ses actes. Toujours il retombait du mauvais côté, du côté de la souillure de l'âme pour quelques années de vie qui ne doivent jamais être regardées après avoir été vécu. Des sensations instantanées, comme des plaisirs, qui ne sont pas bons. C'est terrible de le voir se corrompre, Henry marchant sur quelques fêlures, faiblesses, les tirant avec lui jusqu'à l'y emprisonner, empoisonner le reste. J'ai maintenant pitié pour ce personnage si néfaste. Le personnage un peu plus effacé après le début du récit, le peintre du fameux portrait, Basile, représentait vraiment pour moi, un amour pur. Alors que Henry ne se souciait que du fait que Dorian soit mêlé à une fameuse affaire, lui venait avec inquiétude et souffrait avec lui. Pour le dire en peu de mots, qui ne renvoient pas toute la beauté de ses sentiments. Et il y a tellement plus d'exemple, si merveilleux. Mais comme dans la vie ordinaire, on a tendance à ignorer les personnes qui nous sont vraiment bonnes...aussi, vers la fin du récit, j'étais totalement indignée par un certain événement le concernant. Lire ça, mais je pensais profondément halluciner, j'ai presque perdu toute foi. J'aurai du la perdre totalement. Ayez un Basile dans votre vie et aimez le. Je ne me suis pas ennuyée un instant dans ce récit si suffisant à lui même. Il n'avait besoin de rien, il entendait tout. Les personnages y jouent un rôle fondamental, dialoguant, si ce n'est incarnant des philosophies, des valeurs.

Enfin ! Enfin je me suis attelée à lire ce classique ! Je n'avais à vrai dire que très peu d'idées sur ce qui m'attendait, n'ayant jamais ouvert un écrit de O. Wilde et ne connaissant à peine que quelques bribes de son existence et de son art. ''Le portrait de Dorian Gray'' c'est un livre sur la vanité démesurée, les passions décadentes, la beauté de l'âme versus la beauté du corps ... en soit une tragédie cynique dans une époque divisée entre les actions inavouées et le paraître de l'aristocratie anglaise. Les personnages sont atypiques, les dialogues aux sous-entendus assez grisants, un champ lexical très floral (oui oui j'ai beaucoup apprécié cette subtilité), une dénouement légèrement prévisible mais qui n'en altère pas moins le récit. Tout cela, mélangé à l'époque à laquelle le livre à été écrit, rend le roman encore plus puissant. Un véritable classique.