Les Guerriers de l'hiver : Le livre de Olivier Norek, Thierry Blanc

Un ouvrage qui ne laisse pas indifférent, un vrai témoignage sur une guerre oubliée, entre la Finlande et l'URSS, en 1939-1940. Un tout petit David contre un énorme Goliath. Tiens-tiens... étrange ressemblance avec l'actualité. Dans ce livre, les pages s'enchaînent à coup de descriptions terribles de véritables carnages et l'on s'étonne des "performances" de ces snipers capables de pulvériser des quantités astronomiques d'ennemis à des distances inimaginables. Au-delà de ces générations sacrifiées, de part et d'autre, on frémit de ces scènes où les mots de l'auteur sont si durs qu'on dirait qu'ils sont tâchés de sang. Lecture perturbante.

Je connais l’auteur de polars et de thrillers à succés, je le découvre en auteur de roman historique et c’est une pure merveille. J’ai dévoré tous ses livres avec ou sans son personnage principal, Victor Coste. Mais avec celui-ci, Norek confirme qu’il est parmi les auteurs de la littérature française à posséder une extraordinaire écriture. Il a été dit beaucoup de choses positives sur ce livre, couronné de deux prix littéraires, le Prix Renaudot des lycéens et le Prix Jean Giono 2024. Je ne referai pas le récit de "La légende de Simo", le petit sniper finlandais, surnommé la Mort Blanche. D'autres le feront mieux que moi. C’est avec des mots simples, mais tranchants, que Norek nous décrit une guerre effroyable, sanglante, entre la Finlande et la grande URSS de novembre 1939 au 13 mars 1940. Elle sera oubliée des livres d’histoire par ce qui sera quelques mois plus tard la Seconde Guerre mondiale. C’est extrêmement bien décrit, documenté, immersif et visuel. Je ne m’attendais pas, en commençant ma lecture, à être touché à ce point. Ça prend aux tripes et ça ne vous lâche plus. Norek nous dévoile un roman basé sur des faits réels qu’il nous explique en fin de livre par une bibliographie. « Les dialogues proviennent souvent d’archives ou ont été transmis par des passionnés, des militaires et des historiens. Aucun fait d’armes n’a été inventé, ni aucune anecdote. Aucun acte de bravoure n’a été exagéré. Et, bien sûr, Simo Häyhä a vraiment existé. » On apprend que l'auteur a même fait le déplacement pour être au plus près de la réalité. Un livre choc, un récit bouleversant, glaçant, à couper le souffle. Celui d’un petit peuple au grand cœur, qui s’est dressé contre la cruauté d’un homme, Staline, qui voulait l’engloutir. Malheureusement, l’histoire se répète aujourd’hui, les leçons du passé n’ont servi à rien. Un énorme coup de cœur, un roman passionnant, rempli d’émotions, à lire et à offrir, que vous soyez féru d'histoire ou pas.

Malgré ma note peut être sévère de trois étoiles, je trouve que ce livre est un incontournable. Dans une langue simple, claire et efficace, Norek nous conduit progressivement au cœur de ce conflit oublié opposant la Finlande à la grande Russie, à la veille de la seconde guerre mondiale. On y rentre à pas de loup, prenant la mesure de la rudesse de ce territoire glacial et inhospitalier. Caché derrière le col rabattu des vareuses militaires, on fixe les silhouettes ennemies se détachant du blanc immaculé et létal. On fait le point pour progressivement zoomer sur cette armée ennemie voisine dont on découvre les us et coutumes. On « fait connaissance », en esquissant 3 pas en avant puis 3, vers l’arrière. On focalise sur ses atouts terrifiants : les armes, le nombre. On met à jour ses faiblesses et on encaisse ses ruses et ses pièges. Et les mâchoires acérées de la guerre se ferment bientôt sur nous, lecteur, comme sur les protagonistes de l’histoire, tout entiers dévorés par la brutalité affamée de ce conflit avide de chair humaine et de sang frais. Comme Simo, le héros bien nommé de ce récit, on étouffe sous les amas de cadavres, le souffle coupé par l’inhumaine gestion des soldats par leurs chefs gradés ou politiques, en apnée quand le romancier nous conduit de charniers en fosses communes, de tranchées où la vermine pullule en cratères d’obus retenant le sang noir des soldats. Clairement à vocation documentaire, comme pour donner à l’histoire des manuels scolaires un souffle puissant de réalisme, un écho de cœurs battants et un miroir de visages humains, Olivier Norek veut faire renaître des pages de son récit une véracité historique construite sur des faits réels, bâtie grâce à un travail documentaire patient et acharné. Ce pan d’histoire le passionne et il se jette dedans à corps perdu comme Simo dans cette guerre où il y va de l’honneur de son pays et de sa loyauté envers lui. Cette volonté de nous emporter avec lui sur le front de Kollaa est palpable et en tant que lecteur, nous n’y résistons pas. Malgré l’apparente dualité de la fiction historique que Norek veut pourtant la plus proche des faits tout en apposant le mot « roman » sur la couverture, Les Guerriers de l’hiver s’inscrivent pour moi plus dans un processus didactique d’un chapitre d’histoire méconnu que dans un récit romanesque classique. En effet, les dialogues sont rares et l’expression des pensées et sentiments des personnages est enfouie sous la relation factuelle de leurs faits et gestes et de celle des événements. On y apprend beaucoup. On poursuit nos recherches en aparté. On crée nos propres paraboles en faisant le lien avec la guerre actuelle en Ukraine. Trois étoiles pour moi car l’artifice du romancier m’a manqué. J’ai trouvé cette lecture aride même si j’en conviens, elle fut édifiante. La discipline militaire aura pour mon goût trop contraint le roman qui s’en retrouve cerné de barbelés, agonisant sous la mitraille. Norek en entretien explique son parti pris et je le comprends très bien mais mon petit cœur littéraire avide ne se refait pas !

[masquer]Olivier Norek auteur que j’apprécie particulièrement signe un livre incontournable. Ce roman historique tient en haleine le lecteur du début à la fin. Puissions nous ne jamais vivre le drame des vaillants finlandais ni des pauvres soldats russes. [/masquer]