Martin Eden : Le livre de Jack London

Un cadeau de Noël, il y a quelques années de cela. Un livre, à la belle couverture, et ce titre : "Martin Eden". L'un de meilleurs romans qui m'ai été donné de lire, écrit par cet auteur incomparable, que j'admire tant et dont j'ai dévoré depuis les plus grands succès. Un souvenir impérissable. Un personnage éponyme flamboyant, touchant. Une dénonciation des inégalités sociales qui transcendent tout, même l'amour. Une réflexion profonde sur la littérature et la créativité. C'est un roman qui est au-delà du roman. Sa lecture m'a fortement marquée et je m'y replongerai avec bonheur, pour retrouver les frissons de ma rencontre avec Jack London. Relecture en janvier 2025

"J'avais déjà tout écrit". Une phrase lourde de sens qui hantera Martin Eden et qui à mon sens, résume parfaitement les quasi 450pages de ce magnifique roman, le plus autobiographique de Jack London. Un roman qui m'a souvent fait de l'œil, à travers ce site, mais aussi dans les rayonnages des librairies et médiathèques, mais sans vraiment me pousser à me lancer dans sa lecture. Connaissant rapidement l'auteur, j'imaginais un roman d'aventure en mer, solitaire et descriptif… et quelle fut ma (très belle) surprise de découvrir que ce n'était pas (que) ça ! Sans résumer l'histoire, je dirai que l'on y suit l'ascension sociale du personnage principal, Martin Eden, et du désordre qu'elle va causer chez lui ainsi que de ses désenchantements. C'est d'abord l'Amour qui va l'élever de sa condition puis la littérature. Parfois, souvent, ces derniers ne coïncideront pas ensemble et j'ai aimé suivre cette ambivalence et les biais cognitifs qu'ils génèrent chez les personnages. L'amour est grand chez Martin Eden, mais pas seulement, il va l'amener à changer de comportement, à s'adapter, à renier ces valeurs ? Pas nécessairement, mais il va jeter un voile sur sa vie et Ruth Morse va tenir une grande place dans ce cœur voilé. L'accès à la littérature va tenter de dissiper ce voile et va l'amener à porter un nouveau regard sur le monde, sur les classes sociales et ce qu'il pense être le mieux pour lui. Mais là aussi il s'y perdra. Beaucoup de scènes m'ont fait réfléchir, mais si je n'en retenais qu'une seule, c'est celle de Martin Eden qui, absorbé dans un travail acharné au sein d'une blanchisserie, n'aura plus l'énergie physique et mentale pour penser le monde, lui qui alors, dormait peu pour s'instruire et réfléchir aux grandes questions philosophiques qui l'obsèdent de plus en plus au fil des pages. Comment avoir le temps de penser aux questions de ce monde si les besoins fondamentaux ne sont pas comblés ? Comment avoir encore la force de s'instruire, de penser par soi-même en rentrant d'un travail éreintant et ne pas se caler devant la télévision et les réseaux sociaux ? Ces questions nous obligent à repenser notre façon de vivre au quotidien, tout en continuant à se questionner sur les grandes questions de l’humanité, mais en restant conciliant avec les autres sans être déconnectés de la réalité. Et cela rappelle qu'avoir le temps de lire un roman et un luxe pour certains et qu'écrire une critique est un temps que beaucoup ne peuvent s'offrir. Ce billet est pour eux.

Histoire d'une ascension sociale vécue comme une tragédie, ce roman magistral me marquera durablement. Martin Eden est un personnage déchiré entre sa volonté de réussir à tout prix et le désespoir une fois parvenu au sommet, submergé par le désenchantement qui accompagne son passage de l'ignorance à la connaissance. La fin, tragique et sublime, est une des plus belles qu'il m'ait été donné de lire.

Un grand roman d’apprentissage. Le moteur de Martin Eden est la curiosité intellectuelle, son amour pour la belle et inaccessible Ruth et l’ambition de faire quelque chose de sa vie. Tout cela est rendu avec une grande justesse, tout comme la métamorphose du personnage central. Un autre thème, tout aussi passionnant, est l’antagonisme de classes et la vision sociale de l’auteur. (*) J’aurais aimé goûter ce roman sans réserves. Cependant, j’ai trouvé parfois des redondances et, dans les derniers chapitres, des complaisances ou gaucheries. ……………………… (*) J’ai fait un petit détour sur wiki pour découvrir ce que c’est le darwinisme social : une théorie qui applique les concepts de sélection naturelle aux sociétés humaines. Dans ce contexte, l’auteur comme son personnage semblent tiraillés entre l'idéal socialiste de solidarité et l'idée darwiniste de lutte pour l'existence.