Quelque chose à te dire : Le livre de Hanif Kureishi

On retrouve ici les mêmes ingrédients que le Bouddha de banlieue. Londres, une communauté anglo-pakistanaise, et autour d'un narrateur personnage principal (Jamal) un microcosme de nantis constitué par les amours - époux, amants et ex-, la famille, les enfants, les frères et soeurs, les amis. Alcool, drogue, sexe, soirées, visites chez les uns et les autres, états d'âme, réflexions sur la vie, évolution de tous ces personnages qui se croisent dans tous les sens. Habif Kureishi est un excellent conteur, ancré dans la réalité, brillant pour camper des personnages et les faire vivre, fin psychologue, capable de réflexions justes sur les tourments de l'existence : l'amour, la sexualité, l'amitié, la réussite professionnelle, le vieillissement, le racisme, l'assimilation des communautés étrangères en milieu urbain, etc. Mais alors que j'avais beaucoup aimé le Bouddha de banlieue, ici j'ai fini par me lasser pour plusieurs raisons : - Des personnages et leur petites histoires qui finissent par être lassants. - Certains événements sont totalement improbables, astuces du romancier pour prolonger l'intrigue, qui éveillent chez moi un sens critique de plus en plus négatif ( par exemple le scénario autour de Wolf, l'ami de Jamal, son parcours, sa disparition, sa réapparition, son chantage, sa disparition encore ; ou encore cette histoire de viol et de meurtre et toute l'intrigue autour de ça digne d'un film Bollywood, peu crédible). - le côté caricatural qui finit par s'imposer chez presque tous les personnages. - des discussions parfois pléthoriques et des chamailleries de famille pas indispensables - Une narration avec trop de retours en arrière plutôt qu'un récit chronologique et continu - Trop de nombrilisme, de drogue, d'alcool. - Certains événements, faits, personnages et éléments de culture, outre qu'aujourd'hui ils sont datés, concernent davantage l'Angleterre que la France, et ne m'ont pas forcément intéressé. Ce que j'ai beaucoup aimé en revanche c'est l'univers de la psychanalyse, les aspects historiques, les réflexions sur la thérapie et son intérêt. J'ai lu que Leptitchat, dans sa critique, comparait en négatif ce roman avec "Mensonge sur le divan" d'Irvin D. Yalom. Je ne suis pas d'accord du tout. J'ai personnellement adoré Mensonges sur le divan . La narration et le style de Yalom n'ont rien à voir avec ceux de Kureishi. Chez Yalom il n'y a aucun déchet, on reste sobre, on sait se tenir, on réfléchit de façon concentrée sur de vrais problèmes existentiels abordés en thérapie et traités en thérapeute qu'est l'auteur. Donc, pour moi, un roman qui se lit bien mais qui aurait gagné à être raccourci et simplifié dans son intrigue, les dialogues, les personnages eux-mêmes.