Staline La cour du tsar rouge - tome 1 1929-1941 : Le livre de Simon Sebag Montefiore

Epouvantable. Ce bouquin est tout simplement épouvantable mais incontournable pour celui qui veut s'informer sur ce pan de l'histoire russe et la personnalité de Staline. Parfaitement documenté, il conte avec force détails la vie privée de Staline, dont le pouvoir, d'après l'auteur, reposait sur le charme, car sachant créer une ambiance bon enfant au Kremlin, décrit ses rapports amicaux et houleux avec les potentats bolcheviks dont il s'entourait, les Yagoda, Beria, Ejov, Kirov, Molotov et d'autres, dont certains seront éliminés lors des grandes purges des années trente, l'existence campagnarde agréable menée dans la datcha de Zoubalovo, les vacances sur la Riviera russe de Sotchi ..... et les horreurs commises au nom de la création d'un monde nouveau, pour faire de l'Urss un paradis présentant au monde la glorieuse vitrine du socialisme triomphant. "Loin d'être le bureaucrate médiocre et terne que dédaignait Trotski, le vrai Staline était un expert en mélodrames, énergique et vaniteux, une personnalité exceptionnelle à tous égards. Sous le calme inquiétant de ces eaux insondables se cachaient des tourbillons mortifères d'ambition, de colère et de malheur. Capable aussi bien de procéder graduellement que de jouer le tout pour le tout avec témérité, il semblait revêtu d'une armure d'acier glacial, mais ses antennes étaient extrêmement sensibles". Ce "politicien hypereintelligent et talentueux ayant pour seule priorité son propre rôle historique" adorait la littérature, lisait compulsivement, ne cessait de travailler pour s'améliorer en autodidacte acharné et devint extrêmement cultivé. Il ne sut pas vraiment aimer son épouse Nadia, mais sa mort tua en lui tout reste de sensibilité et exacerba sa brutalité et sa paranoïa. Montefiore n'épargne rien au lecteur - pas plus l'abominable famine orchestrée par Staline, pour, en extorquant le blé par la force, se donner les moyens, en le vendant, de créer une base industrielle solide pour l'Urss ... cependant que les dirigeants passaient de joyeuses vacances sur la Riviera russe, - que les travaux pharaoniques, souvent mal conçus et parfois inutiles menés par des ouvriers esclaves, - les meurtres de masse perpétrés par des bourreaux totalement insensibles car tuer n'est rien au regard de leur supériorité morale .... qui obligent quasiment le lecteur bouleversé à nager dans le sang, - et les règlements de compte dus à la paranoïa du petit père des peuples qui voyait des ennemis partout ! "Ce que nous avons là, c'est une histoire sociale de l'enfer" dit un critique à propos de cet ouvrage. Fort juste remarque ! Ce premier volume s'interrompt au moment de l'invasion nazie de juin 1941 et il est remarquable de constater que Staline, bien qu'ayant été prévenu, ait refusé de croire, funeste erreur de sa part, que Hitler allait lancer ses troupes sur la Russie !