Zones limites : Le livre de Jean-Paul Kauffmann

Le Bordeaux retrouvé « La souffrance n'est pas un statut » Petite histoire personnelle avec le pouvoir du livre dans ce nouveau monde de l'Ineternet, dans lequel de plus en plus la plupart sont nés dedans, et dans vingt ans, il n'y aura plus que ça ! qu'est-ce qui change comme Ineternet l'est au bal moderne, et là pour le coup en immersion totale ! Ctop, Ctop ! Je guettais en 2023 la sortie d'un nouveau Jean-Paul Kauffmann car tout simplement j'avais envie de lire du Kauffmann qui m'avait envoûté avec son précédent empreint de mysticité, et puis confusément, je formais le voeu d'en apprendre sur le lourd secret qu'il portait en lui en lien avec son passé d'otage du Liban qui avait défrayé la chronique. J'en avais eu des bribes comme tout le monde, mais de là à dire, de ce mécanique là, qu'on savait tout et l'essentiel, je ne me serais pas risqué pour un plat de lentilles.. Pour la rentrée 2023, ne parlons pas de moisson, il fait gla gla, J'apprends la sortie de Zones limites, livre assez épais. Je le compulse en librairie et je m'aperçois qu'il n'est qu'un recueil de ses oeuvres choisies. Espoir vain et déçu ! Sympathique, mais en plus je privilégie une oeuvre, un livre à ces condensés qui ne sont que des faits d'édition. Peut-être est-ce utile pour la plage, mais je ne lis jamais sur la plage, même si ce n'est pas faute de mettre toujours un livre dans mon sac, Comme tout breton qui se doit d'avoir une boîte de pâté Henaff dans son sac, moi c'est un livre !.. Tout récemment, je me penche sur l'actualité littéraire en podcast, comme jadis je feuielttais les revues littéraires en papier, et je tombe incidemment sur une interview de l'auteur en lien avec la parution de ce livre. Et là, autre son de cloche, j'apprends l'existence de ce Bordeaux retrouvé, inédit donc au milieu de ses textes connus, répondant en plein à mon attente… Cet homme a toujours aimé la littérature, - il a même été journaliste par défaut - , mais ici c'est autre chose dont il s'agit, c'est l'écriture qui l'a aidé à se sortir des ténèbres en quelque sorte dans lesquelles il a été plongé pendant plus de 1000 jours comme otage au Liban dans des conditions de détention insoutenables. Quand je dis ténèbres, ce n'est pas une figure de style littéraire, c'est une réalité abjecte dont on se demande encore comment après cette attente interminable il a pu sortir indemne. Enfin indemne, c'est bien toute la question. La littérature l'a aidé dans ses conditions de détention, au compte gouttes, à la mesure de ce que lui concédait comme livres son geôlier, mais c'est réellement l'écriture qui lui a permis post-incarcération de retrouver un semblant de vie.. Et cet homme est donc devenu un écrivain, au bon sens du mot. Il était excédé qu'on lui parlât sans arrêt de sa détention au Liban, il cultivait le paradoxe, à son corps défendant, de ne pas avoir écrit sur le Liban, et là dans Zones limites, avec le Bordeaux retrouvé, une métaphore, il intègre ce texte dans le recueil de ses bonnes oeuvres qu'il avait écrit à sa libération sur le sujet en regard des différents correspondants qui s'intéressaient à lui. Je me souviens, j'en guettais même par une curiosité presque morbide le suivi de santé d'un homme écrabouillé par le sort abject qu'il venait de connaître. Il évoluait tel un zombie qui a salement morflé. Il communiquait très peu, on pensait même qu'il était à moitié chtarbé et qu'il finirait ainsi sa vie. C'était bien mal connaître les forces morales de cet homme. Pour étayer mon propos, son état me renvoyait à l'Espèce humaine de Robert Antelme. Quand je dis 1000 jours plus haut, c'est presque faire offense à l'intéressé de ne pas en dire exactement le nombre, car on imagine tres bien qu'il les comptait ses jours. Et puis, il y avait aussi la télévision qui pendant tout ce temps les comptait aussi. Comme le bon vin de Bordeaux, cet homme a bien vieilli, est devenu un grand homme quand on passe trop son temps sur la vie des hommes qui ne valent pas un caramel. Il me tient à cœur de lire sous la plume de Kauffmann qui dédie ce livre à son compagnon d’infortune qui a eu moins de chance que lui: son ami Michel Seurat que les terroristes libanais ont laissé crever dans leur « cachot hermétique ». Aujourd'hui, Jean-Paul Kauffmann a 80 balais, semble à peu près trouver son bonheur. Je n'ai aucune envie yinfo depuis ce Bordeaux retrouvé publié début 2023. Mais il est sûr que des ombres planent encore sur sa tête, et s'il commet un nouveau livre, je ne serai pas le dernier à le lire . Nous avons tous des ombres qui planent au dessus de nos têtes, mais lui il a été bien servi ! PG 21 janvier 2025.